Les évadés du paradis
au Shams théâtre
Un rythme d’enfer, un texte dense dit à toute allure. « Les évadés du paradis » raconte les dieux, presque tous : Dieu, bien sûr, mais aussi Zeus en super héros rouge, Saint Pierre et son registre (joué par une femme), et les autres (tous en tenue de super héros), pas d’accord entre eux. Un paradis loufoque d’où deux énergumènes tentent de s’échapper, tant ils s’ennuyaient. Un est décidé, l’autre moins, mais s’échappe-t-on du paradis ? Et comment ? Les dieux se critiquent entre eux, se battent presque et font tout pour empêcher les évadés de réussir.
La mise en scène minimale laisse la place à un texte bien documenté et écrit par Arnaud Patron et joué par quatre comédiens surexcités : Mathilde Serre, Emilie Waïche, Etienne Audibert et Drys Penthier (jouant dix-huit personnages). Le loufoque se mêle à une critique acerbe des croyances , remettant en question notre rapport à la foi et à notre imaginaire religieux simpliste et contradictoire. Tout va très vite, on ne peut pas tout suivre, mais ce n’est pas très grave.

Les Redoutables
L’Oriflamme Théâtre
3-5 rue du Portail Matheron
On est dans la loge de trois comédiennes avant, pendant et après l’avant-dernière de leur spectacle qui a si bien marché qu’un film est prévu. Malheureusement, elles apprennent que le metteur en scène, le mari de l’une et l’amant caché de l’autre, a décidé de confier leurs rôles à des actrices plus connues (Sophie Marceau et Catherine Deneuve). À partir de là, dans un enchaînement rocambolesque de faits – et de méfaits – à un rythme très soutenu. Les comédiennes (Ariane Séguillon, Sylvie Audcoeur et Juliette Meyniac), amies à la vie, à la mort, nous entraînent dans un délire humoristique fait de répliques décapantes et de nombreux rebondissements.
Le texte d’Isabelle Alexis et la mise en scène de Jean-Luc Moreau servis par trois personnalités bien différentes incarnant parfaitement les travers des comédiennes sont très réussis et efficaces.

Boire baiser écrire
Shams théâtre – 25 rue Saint-Jean Le Vieux
Oldan, auteur, chanteur, écrivain est un personnage qui aurait plu à Bukowski. Sans concession, dans cette pièce (qui est bien plus qu’une lecture de textes), il joue (sans jouer) à être le célèbre auteur américain déjanté. Il boit et nous parle directement, vraiment, de lui, de son rapport à l’écriture, à la boisson, au temps, à la mort, aux femmes, etc. Touchant et émouvant, son désespoir apparent ne manque pas de lucidité. Il ne boit pas pour boire ou pour écrire ou pour…, il boit pour s’échapper de lui-même et préfère la poésie sans contraintes, sans récit, presque sans objet. Les mots lui suffisent peut-être. Il n’a pas essayé d’écrire sans boire, il boit et il écrit, c’est comme ça…
Oldan nous présente un Bukowski intime, on ne sait plus d’ailleurs par moments qui est qui, celui qui parle ou celui qui lit des textes puisés dans un des livres de la pile posé sur la table.
A la fin du « spectacle », après tout ce qu’il a bu tout en nous parlant (trois cannettes de bière, un demi-litre de vin rouge et quelques shots de whisky ou de cognac – j’ai compté), il s’assoit devant nous et commence un après-spectacle où il dialogue directement avec le public, où il explique ce qu’il fait, ce qu’il vient de faire ou fera – et on pourrait passer des heures avec lui à parler de Bukowski (qui n’est pas seulement celui qu’on a vu chez Pivot), de la vie, de l’écriture et de l’intime, mais le théâtre doit fermer et il faut bien s’arrêter.
